L’Abbé Pierre, figure emblématique des sans-abri et des démunis tout au long de sa vie, fait désormais face à neuf nouvelles allégations d'abus sexuels selon un rapport publié par Egaé, un cabinet de conseil spécialisé.

Commandé par Emmaüs, l'organisation qu'il a fondée, ce rapport inquiétant a été rendu public le 13 janvier et apporte du poids à une enquête en cours sur sa conduite passée, totalisant 33 témoignages jusqu’à présent.

Le rapport détaille des allégations allant de l'agression sexuelle aux actes incestueux et au viol d'un mineur, qui se seraient produits principalement en France mais aussi à l'international, sur une période de près d'un demi-siècle.

Un récit particulièrement poignant décrit un comportement inapproprié impliquant un jeune parent à la fin des années 1990. Une autre allégation concerne une pénétration sexuelle perpétrée contre un mineur.

Les témoins à l'origine de ces accusations incluent un ensemble diversifié de personnes : un employé d'un hôtel où séjournait l'abbé, des travailleurs de la santé lors de ses hospitalisations, un bénévole lors d'un camp de jeunesse, un membre de sa famille et une hôtesse de l'air.

Malgré la gravité et la spécificité de ces récits, Egaé prévient que ces conclusions pourraient ne pas représenter un catalogue exhaustif des supposés méfaits de l’abbé, en raison de témoignages potentiels supplémentaires restant anonymes ou incomplets.

Ce dernier rapport constitue la troisième enquête menée par Egaé, à la demande d'Emmaüs International, Emmaüs France et de la Fondation Abbé Pierre.

Le rapport de juillet 2024 avait choqué le public en présentant les premières allégations, ébranlant l'image impeccable d'un homme longtemps considéré comme un icône de la charité et de la compassion.

Les révélations ultérieures en septembre ont conduit à d'importants changements institutionnels ; la Fondation Abbé Pierre a annoncé un processus de rebranding, tandis qu'Emmaüs a fermé définitivement le mémorial qui lui était dédié à Esteville, en Seine-Maritime.

À la lumière des dernières divulgations, la Conférence des évêques de France (CEF) a exprimé sa profonde horreur face aux "faits cumulés" en rapport avec l’Abbé Pierre.

Exprimant une immense douleur pour les victimes, la CEF encourage tout survivant cherchant un soutien à s'engager avec les programmes d'écoute et d'assistance offerts par l'Église ou ceux établis par Emmaüs. Ces révélations coïncident avec des mouvements mondiaux plus larges contre la dissimulation et la mauvaise gestion des abus sexuels au sein des institutions religieuses.

Alors que les enquêtes sur la conduite de l'Abbé Pierre se poursuivent, la société française se débat pour réconcilier l'héritage d'une figure publique vénérée avec ces lourdes allégations.